> ECONOMIE : 150 RAISONS D'ÊTRE PROTECTIONNISTE
10.09.2013 - C’est une information qui n’a pas fait la une des médias : 150 nouvelles mesures protectionnistes ont été prises depuis un an. De quoi contredire tous ceux qui disent qu’il ne serait plus possible de faire du protectionnisme dans le monde actuel et souligner la naïveté de l’Europe à ce sujet.
Le protectionnisme, c’est maintenant (et hier, et demain)
Dans le discours des promoteurs dogmatiques du libre-échange, le protectionnisme est une pratique d’arriérés économiques (Corée du Nord ou Albanie), qui serait un frein au développement.
Mais cette présentation des choses est totalement caricaturale, le choix n’étant pas entre un gentil libre-échangisme sans la moindre restriction et un méchant protectionnisme qui confine à l’autarcie. Dans la réalité, les choses sont beaucoup plus compliquées. Tout les pays du monde ont des pratiques protectionnistes, y compris l’Union Européenne (pour l’agriculture, même si c’est de moins en moins le cas) ou l’Allemagne (qui protège ses industriels par des normes DIN spécifiques).
Cette étude de la Commission Européenne montre l’ampleur du phénomène puisqu’elle recense près de 700 mesures protectionniste depuis 2008, dont 150 depuis un an ! Tous les pays sont protectionnistes. La palme revient aux pays d’Amérique Latine, notamment l’Argentine (en pole-position) ou le Brésil. Buenos Aires reconstruit une industrie du jouet et a imposé la construction d’une usine de production de téléphones portables. Brasilia impose des droits de douane de 40% sur les automobiles importés et a imposé à Apple de se fournir localement pour ses IPad. Mais l’Asie est également très active dans ce domaine, puisque le protectionnisme est au cœur de leur modèle de développement.
Le protectionnisme, une protection pour les emplois
Ce qui est frappant, c’est que ces mesures n’ont pas provoqué de cataclysme économique. Il faut rappeler ici que, malgré de réelles limites, l’Argentine affiche un des meilleurs taux de croissance au monde en 2013 (4.3% selon The Economist). Et ces mesures n’ont pas provoqué de guerre commerciale, contrairement à ce qu’évoquent les défenseurs dogmatiques de l’anarchie commerciale. Qui a fermé son marché à la Chine, le Japon ou la Corée du fait qu’ils ferment leur marché automobile ? Quelles sont les conséquences de la fermeture du marché étasunien pour les pneus ou l’acier ? Il n’est pas anodin de constater les fermetures d’usines en France dans ces industries, non protégées en Europe.
De manière intéressante, l’Union Européenne est la zone de plus faible croissance du monde. Outre les méfaits de la monnaie unique, on peut attribuer à l’ouverture anarchique aux importations du monde entier cette mauvaise performance économique. Et cela est bien logique puisque les écarts de coûts salariaux condamnent la plupart des industries dans la partie occidentale de l’UE, à moins d’avoir constitué un écosystème particulier comme l’Allemagne. Le seul moyen de réduire le chômage est d’instaurer des écluses commerciales avec les pays à bas salaires de manière à éviter une course au moins-disant salarial, et social. Et les exemples ici montrent que cela est parfaitement possible.
Non seulement le protectionnisme est nécessaire, comme l’ont compris deux tiers des Français selon les sondages. Mais ce que montrent cette étude et qu’il faut marteler, c’est que mener une politique protectionniste est parfaitement possible, puisque cela se fait déjà aujourd’hui.